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Collection d'écrits sur la spondylite ankylosante

5 - handicap, public

“Oh, tu t’es blessée?” C’est probablement la phrase que j’entends le plus quand je rencontre des gens. J’utilise une canne et je suis jeune; c’est une ouverture de conversation facile. Y’a une bonne partie de moi qui veut faire regretter cette porte d’entrée. Répondre graphiquement et vulgairement, pas d'édulcorants. Boum, ma réalité en une phrase choc. “Oh, tu t’es blessée?” Non, c’est juste mon corps qui essaie de fusionner ma colonne vertébrale en un seul os 😘 Non, j’ai juste des douleurs chroniques depuis 2002. ✌🏻 Non, j’ai juste arrêté de prétendre que j’avais pas mal, alors je me suis dotée d’outils. 💪🏻 Bon, ok, la dernière est vraiment positive. 😄 Ça me gosse encore d’être autant visible, mais c’est un prix qui en vaut certainement la peine. Ça normalise. Ça éduque. Ça m’aide. N’empêche ça semble plus facile d’assumer que mon état est temporaire que de me laisser une place dans le métro, alors on a du chemin à faire.

4 - s'arrêter

Début Février 2025, j’étais on top of the world. Puis, mi-Février j’ai une crise de douleur comme j’en ai pas eu depuis que je suis traitée. Quand je demande de l’aide, on me signe un arrêt de travail jusqu’au 30 mai (c’est aujourd’hui ça). Je le voulais pas l’arrêt, j’ai continué à travailler pendant 2 semaines avant d’accepter que je pouvais pas continuer comme ça. Le 30 Mai ça paraissait si loin, ça paraissait exagéré, ça se pouvait pas que j’aille toujours mal rendu là. Depuis, j’ai eu “quelques” rendez-vous médicaux et plus de diagnostics en un seul mois que les 8 dernières années combinées. Cette semaine, mon arrêt a été prolongé. Je sais pas quand je vais retourner au travail. On tâtonne avec mes limites. L’énergie est toujours pas au rendez-vous et la douleur l’est encore trop. Le bon côté, c’est qu’à être forcée de m’écouter comme ça, j’ai jamais eu une vie sociale aussi satisfaisante. Je vais à mon rythme et je profite vraiment de tous ces moments. Des nouvelles et des vieilles amitiés qui continuent de fleurir même dans la maladie.

3 - deuil

Quand j’ai eu mon diagnostic de spondylite ankylosante, j’étais soulagée. Récemment, je le vis moins bien. Pendant des années, les traitements ont réduit les symptômes à des niveaux très tolérables, voire quasi inexistants. Oui, j’étais encore plus raide que la moyenne et oui j’avais des douleurs articulaires, mais je ne me sentais pas limitée. Aujourd’hui, je me sens limitée. Je vis un deuil de mes capacités physiques. Le pire, c’est l’imprévisibilité. Je sais pas si je vais avoir une bonne ou une mauvaise journée et ça peut changer à n’importe quel moment. Je dois écouter mon corps, mais il y a tellement de signaux à décortiquer que la plupart du temps ça fait aucun sens. Une bonne journée semble relativement normale. Des fois j’ai de l’énergie, mais la douleur me limite. Je vais faire de l’escalade, ça aide, mais ça bouffe mon énergie. Une mauvaise journée, j’ai de la difficulté à me laver le visage. J’ai l’énergie de pratiquement rien faire. Juste. Rien. Et c’est correct, mais ça reste dur à accepter.

3 - deuil

Quand j’ai eu mon diagnostic de spondylite ankylosante, j’étais soulagée. Récemment, je le vis moins bien. Pendant des années, les traitements ont réduit les symptômes à des niveaux très tolérables, voire quasi inexistants. Oui, j’étais encore plus raide que la moyenne et oui j’avais des douleurs articulaires, mais je ne me sentais pas limitée. Aujourd’hui, je me sens limitée. Je vis un deuil de mes capacités physiques. Le pire, c’est l’imprévisibilité. Je sais pas si je vais avoir une bonne ou une mauvaise journée et ça peut changer à n’importe quel moment. Je dois écouter mon corps, mais il y a tellement de signaux à décortiquer que la plupart du temps ça fait aucun sens. Une bonne journée semble relativement normale. Des fois j’ai de l’énergie, mais la douleur me limite. Je vais faire de l’escalade, ça aide, mais ça bouffe mon énergie. Une mauvaise journée, j’ai de la difficulté à me laver le visage. J’ai l’énergie de pratiquement rien faire. Juste. Rien. Et c’est correct, mais ça reste dur à accepter.

2 - après le diagnostic

Ça fait 8 ans que j’ai été diagnostiquée. Je suis sur ma 5e médication. Mes articulations sacro-iliaques et mes hanches sont les plus touchées. Ça vient jouer sur ma démarche. J’ai commencé à boiter quand j’avais 9 ans et ça s’est majoritairement résorbé quand j’ai commencé à être médicamentée à 23 ans. Sauf que maintenant j’utilise une canne. J’ai aucune fusion de vertèbres, mais mon bassin est partiellement fusionné à ma colonne. Plus de 20 ans de douleur chronique me laisse aussi des séquelles psychologiques. J’ai la chance d’avoir accès à des médecins, à des médicaments, à de la thérapie, ça rend tout ça plus vivable. Il n’y a pas de fin à cette maladie, mais au moins j’ai un soutien qui me permet de passer au travers des pires moments. Ça, c’est un privilège immense, mais qui ne devrait pas en être un.

1 - diagnostic

J’ai eu mon diagnostic de spondylite ankylosante à 23 ans. Je me souviens très bien de la médecin qui m’a référée en rhumatologie. Elle m’a dit qu’elle était désolée. Moi, j’étais tellement contente d’avoir enfin des réponses et l’espoir d’aller mieux. En fonction de mes radiographies, elle pensait que ça faisait au moins dix ans que je devais avoir des symptômes. En rétrospective, ça fait énormément de sens. J’ai commencé à avoir des symptômes à l’âge de 9 ans. Ça a commencé avec des douleurs aux jambes, que je sentais localisées quelque part entre mes genoux et mon bassin. Ça faisait assez mal que j’avais de la misère à me lever le matin et à mettre du poids sur la jambe affectée. Ça passait d’une jambe à l’autre sans trop de logique, pis des fois c’était les deux jambes en même temps et là c’était terrible. Le diagnostic que j’avais eu à l’époque c’était que mes muscles étaient trop courts et mon traitement c’était de la physio. growing pains J’ai fait des exercices avec plus ou moins de rigueur jusqu’à la fin de mon adolescence parce que j’ai jamais perçu la corrélation entre ça et les douleurs que je ressentais. J’étais déjà tellement raide pour mon âge, alors des étirements ça faisait quand même du sens dans une certaine mesure. Sauf que j’avais jamais eu l’impression que mes douleurs étaient musculaires. Comme de fait, c’était pas ça. Progressivement, ça a commencé à affecter mon dos, puis pratiquement toutes mes articulations. J’étais raide à grandeur, je n’étais que haine et douleur. Rendue adulte, les médecins me prescrivaient des anti-inflammatoires, me disaient que c’était un lumbago et que ça allait passer. Peu importe que ça faisait 10 ans que ça passait pas. Au moins, je me sentais tellement bien pendant deux semaines, turns out que les anti-inflammatoires sont un des traitements possibles. Tout le monde me trouvait (et me trouve) toujours des remèdes. On m’a recommandé les massages, un chiro, des ostéo le curcuma, des étirements, un matelas mou, un matelas dur, plusieurs oreillers, pas d’oreillers, arrêter le gluten, le tiger balm, l’ibuprofène, des tylenols, la glucosamine, d’autres cossins en crème, le thé vert, le vélo, la diète paléo, arrêter la viande, le yoga, dormir avec coussin sous les genoux, prendre des suppléments de vitamine, l'acupuncture, la mélatonine, le gingembre, le régime keto, le régime carnivore, ta mère et son prochain. La médecin qui a tout changé a trouvé ça louche comme histoire, surtout la spécificité des douleurs et la réponse aux anti-inflammatoires. C’est elle qui a poussé plus avec des prises de sang et des radios, puis qui m’a envoyée en rhumatologie au CHUM où je suis suivie depuis 2017. Premiers symptômes: 2002; diagnostic: 2017. Mes niveaux de CRP (protéine c réactive) étaient dans le tapis et on faisait état d’une sclérose bilatérale modérée au niveau de mes articulations sacro-iliaques dans mes radios. Ça, c’est bon pour un diagnostic parce qu’avec un problème visible aux radiographies, c’est dur de dire que c’est pas ça et t’as donc pas besoin de pousser pour un IRM pour constater qu’il y a de l’inflammation. C’est lourd comme processus. C’est lourd aussi d’avoir fait confiance aux professionnels qui m’ont apposé un mauvais diagnostic comme enfant et qui ont ignoré ce que je leur disais année après année par la suite. J’ai évité pendant des années de consulter parce que j’avais déjà des réponses, que rien fonctionnait et que de toute façon on m’écoutait pas. J’ai appris à vivre avec la douleur pendant que tout le monde autour de moi me disait “t’es sûre que c’est normal?” et que je leur répondais que c’était juste parce que les muscles de mes jambes étaient trop courts. Non, c’était pas normal qu’une enfant de 9 ans ait de la misère à marcher du jour au lendemain.